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WIKIPEDIA
Wikipédia... pas si libre que cela !

L'encyclopédie sur Internet, ses limites et ses contradictions.
ou : "« Mieux vaut les critiques d'un ami que les compliments d'un ennemi »."


Le concept de Wikipédia est, en théorie une "belle idée" mais dans la pratique une autre réalité que les objectifs annoncés :
- fiabilité,
- ouverture,
- liberté...

Une première critique récurrente tient au contenu même des articles de Wikipédia : sont-ils fiables ?
Ce n'est pas une certitude pour les créateurs de l'encyclopédie, puisqu'ils ont jugé nécessaire de créer une page d'avertissement : "Personne ne garantit la validité, ni l'exactitude, ni l'exhaustivité, ni la pertinence des informations contenues dans Wikipédia."

Voici un petit florilège des principales études critiques sur Wikipédia.


Wikipédia se voudrait une référence...
L'utilité de Wikipédia en tant que travail de référence a été maintes fois remise en cause.
Le manque d'autorité, de responsabilité, et d'examen par les pairs sont souvent considérés comme ses principaux points faibles.

Le manque d'autorité
Avec les publications imprimées, les éditeurs doivent s'assurer que leurs données sont fiables, car leurs moyens d'existence en dépendent.
Wikipédia n'est pas dans cette logique !
Robert Mc.Henry, ancien rédacteur en chef de l'Encyclopædia Britannica l'exprime ainsi en 2004 :
"L'utilisateur qui visite Wikipedia pour se renseigner sur un certain sujet, pour confirmer un point de vue, est plutôt dans la position d'un utilisateur de toilettes publiques. Celles-ci peuvent manifestement être sales, ainsi il devra être très prudent, ou elles peuvent sembler assez propres, de sorte qu'il puisse être rassuré par une apparence de propreté. Ce qu'il ne sait certainement pas, est : qui a employé les toilettes avant lui."

En réponse à cette critique, des propositions ont été faites pour fournir une variété de sources pour la substance des articles (Wikipedia:Provenance).
Mais ces propositions sont tout à fait controversées.

Ceux qui soutiennent le concept de Wikipedia affirment volontiers que :
- Wikipedia est une source plus indépendante que la plupart des encyclopédies traditionnelles,
- la fiabilité est potentiellement plus grande que celle d'une source traditionnelle, puisque des erreurs peuvent être corrigées immédiatement,
- les processus formels employés par les sources académiques (examen par les pairs, etc.) sont également sujettes à l'erreur humaine.
- aucune information ne devrait être prise pour argent comptant, indépendamment de la source,
- les critiques provenant d'Encyclopædia Britannica et d'autres encyclopédies sont forcément orientées de par leur concurrence avec Wikipedia.

A sa décharge, tous les cercles académiques n'ont pas rejeté Wikipedia comme référence puisque certains de ses articles ont été cités en référence dans la rubrique "Enhanced Perspectives" de la publication Science.
Le premier hyperlien vers Wikipedia figurait dans l'article "A White Collar Protein Senses Blue Light" (Linden, 2002), et des douzaines d'autres "mises en perspective" ont fourni de tels liens depuis lors. Cependant, ces liens sont offerts comme sources de fond pour le lecteur, pas comme sources employées par l'auteur, et les "mises en perspective" ne sont pas destinées à servir de documentation de référence en tant que telles.


La partialité systématique de Wikipédia
Les réactions épidermiques de certains « wikipédiens » dés que l'on ose émettre des réserves sur la mécanique d'édition du projet en est la preuve flagrante.

Cela s'accompagne souvent d'un dénigrement des médias classiques qui ne seraient pas plus fiables. Comme si les mêmes failles humaines - fussent-elles numérisées - ne pouvaient pas conduire au même résultat !

Chacun connaît pourtant les limites d'Internet en général, à cette différence près qu'une erreur publiée dans un grand quotidien touchera quelques dizaines de milliers de personnes, voir plus si l'information est reprise par d'autres média sans être vérifiée, alors que la pérénité de la même erreur dans un article de Wikipédia risque une désinformation massive de la population.

Enfin, la majorité des articles sur Wikipédia sont écrits par des gens d'un groupe éthnique, régional ou national donné.
Puisque les auteurs écrivent en majorité sur des sujets qui les intéressent, il est courant de trouver des articles touchant ce groupe, et plus rare de trouver des articles touchant d'autres groupes moins bien représentés sur Wikipédia ou même Internet.


Le vandalisme pourchassé par Wikipédia
Bien que Wikipédia ait pris des mesures qu'elle considère comme suffisantes, puisque les passages vandalisés peuvent être systématiquement corrigés grâce à l'historique complet de l'article, et que ce rétablissement est très rapide, au moins aussi rapide que le vandalisme lui-même... beaucoup considèrent que le vandalisme arrivera à bout de Wikipédia.
Dans le monde de Wikipedia la majorité vient systématiquement et très simplement à bout de la minorité, simplement par le surnombre.
En outre, certaines formes de vandalisme peuvent être détectées de manière quasi-automatique.

Mais le propre mode de fonctionnement de Wikipédia ne génère-t-il pas du vandalisme ?
En effet le simple fait de rajouter des liens est considéré comme du vandalisme (ou spam) !
Mais lorsqu'on a déjà écrit un article circonstancié dans un environnement (moins contraignant que Wikipédia), et vu la difficulté formelle pour modifier un article (parcours du combattant), n'est-il pas plus simple de rajouter à titre de liens connexes le lien de la page sur laquelle on s'est déjà exprimé sur un sujet ?


Critiques du fonctionnement communautaire de Wikipédia
Wikipédia fonctionne sur le mode communautaire, mais cette communauté peut engendrer les problèmes suivants.
- exclusion ou isolement des déviants,
- conformisme,
- constitution d'un noyau d'habitués qui évolue en groupe fermé,
- mainmise de ce noyau d'habitués sur les décisions de la communauté,
- hiérarchisation de la communauté,
- mise en place spontanée de règles communautaires informelles qui peuvent s'avérer contraignantes et sclérosantes,
- décisions parfois « irrationnelles ».
Cela se rapproche tout de même beaucoup du mode sectaire !

Sur Wikipédia, le processus de communautarisation est très engagé :
Il existe un noyau d'habitués, composé pour une grande part des premiers participants au projet, qui a une forte emprise sur la direction globale du projet, et qui évolue en circuit fermé. Ce noyau a joué un rôle essentiel au début du projet. Mais la question essentielle qui se pose aujourd'hui est la suivante : à l'avenir, aura-t-on réellement besoin d'un noyau dur de wikipédiens et faudra-t-il oui ou non leur conférer plus de pouvoir qu'aux autres ?
Question qui se pose aujourd'hui avec d'autant plus d'acuité que le projet grandit régulièrement et qu'il est devenu une sorte de patrimoine collectif.
Or si le contenu des articles est garanti libre par l'application de la GFDL, l'organisation du projet, la sélection des articles, les méthodes de prises de décisions, reposent quant à elles sur des procédés de régulation souvent quasi-informels, dont l'évolution est inconnue à long terme.


Critiques de la contribution ouverte sur Wikipédia
Un des problèmes sur Wikipédia, c'est que vous commencez à écrire tranquillement avec de la bonne volonté, et vous êtes soudain assailli par une meute de contestataires qui ne partagent pas votre point de vue.
C'est assez énervant et ça ralentit le travail de rédaction.
Ne serait-il pas possible de limiter intelligemment la participation à certains articles ?


Critique de la neutralité de point de vue de Wikipédia
Que signifie la neutralité et l'objectivité affichée !
Est-elle vraiment si souhaitable et gage de sérieux et d'information complète ?
Certains domaines comme l'Art, les sciences humaines et sociales, ont-ils une réalité objective intemporelle ?
On pourrait par exemple envisager le procédé suivant :
- En cas de conflit éditorial, on déciderait, par un vote universel, de créer plusieurs pages qui traitent d'un même sujet.
Ainsi, sur des sujets chauds, comme les sujets politiques, religieux ou les pseudo-sciences, chaque groupe disposerait de sa propre page d'expression.
Cela permettrait probablement de gagner un temps considérable, et cela éviterait bien des problèmes, car les conflits éditoriaux créent des discussions interminables, démotivent les utilisateurs et génèrent des rancœurs.
Pour éviter la multiplication des pages parallèles, on pourrait demander l'assentiment de trois ou quatre contributeurs.


Critique de la bureaucratisation de Wikipédia
En s'agrandissant, Wikipédia prend des proportions délirantes.
Les règles deviennent de plus en plus nombreuses et contraignantes.
Quiconque veut participer, doit devenir spécialiste de cet outil et de ses modes de fonctionnement propres ayant pour résultats :
- l'abandon des volontaires de bonne foi,
- l'incrustation des contributeurs oisifs ou en recherche de reconnaissance publique.
De plus, elles sont de moins en moins fondées sur le principe de la libre adhésion.

Enfin, il n'est nullement possible de contacter quelqu'un directement par mail.


Critiques sur le principe Wikipédia de la connaissance libre
La connaissance libre (selon les quatre libertés de Stallman) serait une mauvaise chose.
Voilà quelques-uns des arguments les plus courants :
- la GFDL est une licence qui a beaucoup d'inconvénients (virale, trop rigide...)
- la connaissance libre est de mauvaise qualité,
- la connaissance libre risque de freiner l'innovation.


Critiques sur les inconvénients de la participation Wikipédia
Certaines critiques peuvent, traduire une lassitude individuelle des contributeurs préjudiciable au moral général, et qui peut révéler de véritables problèmes organisationnels.
Par exemple, une critique de ce type sera : « Wikipédia, c'est vraiment un super projet, mais on perd trop de temps dessus, et en plus depuis que j'y contribue, je suis plus stressé, je dors moins bien, et je deviens susceptible... »


Critiques de la fondation Wikimédia
Les préoccupations de cette fondation semblent un peu éloignées de celles du contributeur moyen.
Ne pourrait-on pas être plus transparent sur son fonctionnement ?
Ne serait-il pas possible de participer plus souvent aux décisions majeures ?


L'objectivité comme neutralité
Un des principes fondateurs du projet Wikipédia est l'exigence de neutralité de point de vue comme garantie d'objectivité.
Le modèle du point de vue neutre (ou absence de point de vue) est certes pertinent, mais il faut souligner qu'il peut en exister d'autres.
Comprendre l'objectivité comme l'adoption d'un point de vue critique permet de dépasser les impasses issues de la contrainte de neutralité en vigueur.
Cette redéfinition suppose de mettre entre parenthèse le débat autour de la possibilité d'un point de vue neutre pour se concentrer sur la question de son utilité.
Toutefois ne nous leurrons pas en sciences humaines (par exemple) ce n'est pas l'objectivité qui prime, en l'absence de point de vue cette connaissance dont l'objet est le sujet humain ne serait qu'un délire formel...


Une position dissymétrique sur le web
Certaines critiques concernent la position de Wikipédia par rapport au reste du Web. Elles avancent que le contenu de Wikipédia est pour une bonne part recopié à partir d'autres sites Internet, généralement spécialisés et issus pour leur part de recherches originales.

- Un problème de droit d'auteur, en particulier concernant les données issues de bases de données, les listes, les chiffres, etc. Ces violations de droit d'auteur, interdites selon les principes de Wikipédia, sont moins faciles à détecter et ces données sont de toutes façons moins clairement protégées (voir débat sur le bistro à ce sujet fin décembre 2007) [réf. nécessaire].
- Un effet d'éviction de l'audience des sites Internet spécialisés au profit du seul Wikipédia. A contenu identique, l'internaute préfère Wikipédia qui profite de son nom et de sa position avantageuse dans les classements des moteurs de recherche. L'absence de liens nofollow au départ de Wikipédia condamne les autres sites, même s'ils figurent en source ou en lien dans l'article de Wikipédia, à régresser dans les moteurs de recherche. Cette éviction est injuste (prime au copieur) et dangereuse pour le Web puisqu'elle démotive les webmestres de ces sites spécialisés qui menacent parfois de cesser d'enrichir leur site et de mettre leurs données à la libre disposition.
L'écrivain américain Nicholas Carr, spécialisé dans les technologies informatiques juge ainsi que, « bien que l'usage de la balise nofollow soit certainement compréhensible dans le contexte de la lutte anti-spam, cela transforme Wikipédia en une espèce de trou noir sur le net qui absorbe de vastes quantités d'énergie sous forme de liens mais n'en libère jamais.

Une grande partie des éléments de cette étude est issue de Wikipédia même !
Une prise de conscience théorique affichée, mais qui n'aboutit malheureusement à aucun correctif significatif dans le mode de fonctionnement.


Voici ce qu'en dit Rui Nibau, travers une étude circonstanciée :

Rejet de l'argument d'autorité
Dans Wikipédia, aucun rédacteur n'a de prérogative sur les autres. Chacun apporte sa contribution de manière anonyme, et peu importe que vous soyez boulanger, étancheur-bardeur ou philosophe, vos propos seront traités de façon identique, et cela pour une raison simple :

- à la base, Wikipédia constitue une reconnaissance du fait que l'on peut acquérir des connaissances non seulement à l'école, au collège ou à l'université, mais aussi de manière autodidacte, en visitant un musée, en faisant un voyage et dans bien d'autres circonstances, puisqu'en fait il y a tout simplement de multiples façons d'apprendre et de multiples contextes d'apprentissage.
Patrice Létourneau, « élite ou mérite ? (Dans la foulée de la critique de Larry Sanger) », Carnet de Patrice Létourneau, 24 janvier 2005.

A première vue, on ne peut que souscrire à cette affirmation. Sauf que dire qu'il y a de multiples façons d'apprendre et de multiples contextes d'apprentissage pour tous les savoirs, donc pour tous les sujets pouvant être abordés dans Wikipédia, n'est pas forcément toujours pertinent, comme l'indique d'ailleurs M. Létourneau dans la suite de son article.

Par ailleurs, il est de plus en plus fréquent de voir rejeté le principe d'autorité sous prétexte d'un relativisme des savoirs, de la légitime prise en compte des cultures autres que la nôtre, et d'autres arguments un peu moins avouables. L'approche éditoriale de Wikipédia peut s'inscrire (partiellement) dans ce mouvement.

Pourtant, il y a une confusion naïve (volontaire ou involontaire) entre des notions très différentes : la production du savoir, sa diffusion et l'accessibilité de ce savoir. S'il est plus que légitime de considérer que le savoir doit être accessible à tous, comment justifier que tous, de la même manière, puissions construire et diffuser ce savoir ?! Il y a quelque chose qui m'échappe... L'apprentissage, la formation, la transmission, l'éducation, l'expérience n'auraient-ils plus aucun sens, ou tout un chacun acquérait-il un savoir de manière immanente ?!

On ne devient pas maçon en parlant de maçonnerie, on ne devient pas scientifique en lisant les journaux de vulgarisation ou les émissions à la télévision. Entre « il existe une multitude de manière d'apprendre » et « tout le monde peut écrire sur n'importe quoi », il y a tout de même une différence, non ?!

Pour réparer ma baignoire qui fuit, je préférais toujours suivre les conseils ou faire appel à un plombier plutôt que de compter sur le « savoir » de mon voisin qui regarde des émissions de bricolage en boucle sur France 3.


La force du nombre
Autre argument pour témoigner de la vigueur et des outils correctifs du projet communautaire, la force du nombre.

Sauf que, l encore, ce n'est pas parce que 10 000 personnes valident un article qui dit que 1 + 1 = 3 que cette assertion devient juste. Ce n'est pas parce qu'Einstein et des dizaines de chercheurs à sa suite ont dit que la masse d'un corps courbait l'espace que cela devient un « fait scientifique ».

La validité ou la pertinence d'un fait ne découlent pas du nombre de ceux qui le considèrent comme « vrai », mais des outils mis à notre disposition pour - justement - vérifier ou infirmer cette validité. Si nous ne sommes pas certains que les rédacteurs des articles disposent de ces outils, qui s'acquièrent par la formation, l'expérience, etc. (d'où la pertinence même du principe d'autorité décrit plus haut), qu'il y ait 1 ou 10 000 rédacteurs n'y changera rien.

évidemment que la concentration de l'autorité, de cette capacité à « valider un fait », entre les mains de quelque uns est problématique, et la mainmise d'une poignée de grands groupes industrialo-médiatiques sur la presse et/ou l'audiovisuel est plus qu'inquiétante, mais la solution est-elle de diluer cette autorité dans une masse informe dont il est impossible de connaître les limites ? N'existe-t-il aucune autre voie que le tout ou rien ?


Le modèle de développement des logiciels libres
Autre argument pour légitimer l'approche communautaire de la rédaction de l'encyclopédie : l'exemple des logiciels libres. Mais Wikipédia n'est pas développée sur le modèle des logiciels libres. Si elle l'était, les interrogations seraient peut-être moins nombreuses.

Par exemple, si nous étudions comment est développé un logiciel libre comme Firefox ?
Il y a, à la base, une équipe de développeurs principaux qui décident à quoi va ressembler le logiciel ou les différents modules qui le composent ; ensuite, ce qu'on appelle la « communauté » participe à un développement dit « à la marge » : signalement de bugs, soumission de morceaux de code, de patches correctifs, tests de versions, écriture de documentations, de traductions, d'extensions ou plugins, entraides sur des forums ou des listes de discussion, etc. Si cette activité à la marge est pertinente, elle finit au bout du compte par être intégrée au logiciel.

Mais ce n'est pas ainsi que fonctionne Wikipédia.

Le code d'un logiciel libre est effectivement accessible tout le monde, mais qui a la possibilité de s'amuser à manipuler ce code ?
Des informaticiens, des gens qui possèdent le savoir nécessaire. Le reste ne développera éventuellement qu' la marge ; c'est ce qu'on appelle un « utilisateur/ contributeur averti ». Et qu'est-ce qui est diffusé pour le grand public ? Le produit fini, compilé.

Les articles de Wikipedia sont accessibles à tout le monde, mais qui va vraiment entreprendre de les compléter ?
Mais si tout le monde sait lire et écrire qui possède le savoir qui lui permettrait d'écrire de façon intéressante sur des sujets pointus ?
Une affaire de spécialiste ou de passionné, qui n'a pas la possibilité de publier sur les supports traditionnels !

Certaines disciplines peuvent très bien s'accommoder de « l'amateurisme » (sans connotation péjorative), y compris en sciences.
Que deviendraient certains savoirs astronomiques sans la contribution d'amateurs traquant nuit après nuit les mouvements des petits corps du système solaire (astéroïdes, comètes) ou la variation de luminosité de certaines étoiles ?! Et la formation d'autodidacte permet de vulgariser les principales notions d'une discipline.
Mais cette vulgarisation a des limites car il n'y a pas de « physicien des particules amateur » ou de « généticien averti ».

L'argument d'autorité prend donc dans certains cas tout son sens.
Placer tous les savoirs au même niveau en leur appliquant le même principe éditorial, c'est nier les spécificités de construction des dits savoirs, et on en revient à ce relativisme qui provoque tant de dégâts, notamment en matière de culture scientifique du grand public.

La manipulation du contenu
Le second type de critiques formulées à l'encontre de Wikipédia concerne la crainte de voir son contenu manipulé.

Le projet part d'un précepte simple et louable : on considère que les contributeurs interviennent sur un article pour en améliorer le contenu. Mais, outre le fait que cette notion d'amélioration peut être radicalement différente en fonction des individus, ce principe de foi est l encore bien léger face la dure réalité du web, où alors il faut m'expliquer d'où viennent les virus, les vers, les spams et autres nuisances ou arnaques de ce genre.

Ces activités mal intentionnées peuvent recouvrir de nombreux cas de figure : dénigrement, diffusion d'une idéologie, contre-information, paravent médiatique, publicité, propagande, etc.

La vigilance de la communauté wikipedia est-elle suffisante ? Une activité bénévole, même de plusieurs dizaines de personnes, serait-elle apte à corriger les « attaques » de, disons une dizaine d'individus rémunérés par un groupe X (quelque soit l'activité de ce groupe : politique, économique, spirituel) pour travailler 24 h/ 24, pendant plusieurs semaines voir plusieurs mois, à diffuser le message qu'il veut faire passer, grossièrement dans un premier temps, puis de manière de plus en plus subtile jusqu'à ce que seuls des spécialistes du domaine puissent distinguer le fait de la manipulation ?!

- Mais cette séduction ne dissipe pas les inquiétudes que suscite l'émergence possible d'un nouvel organe de référence parfaitement anonyme, et donc vulnérable à toutes les manipulations. Qui aura le temps et l'énergie nécessaires pour actualiser, jour après jour, Wikipedia ? Les plus impliqués, les plus militants, les mieux organisés.
Daniel Schneidermann, Libération, 14 octobre 2005.

Le pire, c'est que nous n'en sommes pas encore l. Les quelques débats et polémiques sur des dérives qui ont déjà eu lieu ne sont que des prémisses. N'est-il donc pas légitime de se demander ce que deviendra Wikipédia à partir du moment où elle sera effectivement un outil incontournable du Web, et que des groupes de pression verront l'intérêt qu'ils peuvent retirer de la diffusion de leurs idées en son sein ?!

Une analyse scientifique de Wikipedia
Voilà donc rapidement présentées les principales critiques formulées le plus souvent àl'encontre de l'encyclopédie libre. Ce ne sont que des positions « de principe ». Mais la profession de foi des « wikipédiens » l'est tout autant puisque même si, à ma connaissance, aucune analyse d'envergure n'a encore été menée afin d'évaluer la pertinence de ces réticences, quelques études ponctuelles ont montré, du moins partiellement, qu'elles n'étaient pas totalement infondées (voir les liens en fin d'article).

Une approche expérimentale du débat pourrait être envisagée, à l'image de ce que The Guardian a fait en soumettant certains articles à une lecture critique de professionnels. Elle nécessiterait d'énormes ressources en temps et en compétences d'analyse qu'un travail purement bénévole ne pourrait fournir. Ce qui suit n'est donc qu'une ébauche de protocole.

Les tests à mener pourraient s'articuler en 4 étapes bien définies où l'on ferait varier les conditions initiales :

    - Sélectionner un échantillon d'articles « représentatifs » de ce que l'on attend d'une encyclopédie. Ce ne serait pas forcément les entrées les plus lues ou les plus corrigées.
    - Analyser leur contenu en fonction d'une grille de lecture prédéfinie, avec des critères qualitatifs classiques (pertinence des informations, citation des sources, etc.) tout en tenant compte des particularités propres à Wikipédia (analyse de l'historique et de la page de discussion).
    - Modifier le contenu des dits articles en y insérant délibérément de fausses informations, ou encore en faisant varier le degré de pertinence, et observer la réaction de la communauté (combien de temps avant que l'erreur soit corrigée, si elle est corrigée ?).
    - Mener cette analyse sur plusieurs semaines, voir plusieurs mois, avec des échantillons constitués dans plusieurs disciplines (sciences du vivant, politique, économie, histoire, etc.).

La théorie de l'évolution sur Wikipédia
Mettons donc cette ébauche de protocole en pratique, de manière restreinte évidemment compte tenu des contraintes citées plus haut :

- La discipline choisie est celle des sciences du vivant, parce que c'est un domaine dans lequel j'ai été formé et qu'une première analyse peut ainsi être rapidement menée sans avoir besoin de consulter une documentation quelconque pour vérifier certains énoncés.
- « l'échantillon » sera constitué d'une petite série d'articles consacrée à la théorie de l'évolution. Les pages (article, discussions associées) ont été consultées les 25 et 26 octobre 2005.

Je ne m'attarderais évidemment pas sur les fautes typographiques et/ou orthographiques.

Donc, que peut-on dire de « l'offre » Wikipédia en matière de théorie de l'évolution ?


La ligne éditoriale
Tout d'abord, c'est le gros bordel. Vous avez des articles un peu partout, sans aucune cohérence : « évolution », « théorie de l'évolution » qui redirige vers « évolution », « évolution (biologique) », sans parler d'une entrée « sélection naturelle ». Le premier sentiment est de se dire que les contributeurs n'ont apparemment pas une vision très claire de ce qu'ils veulent raconter, ou plutôt sur la manière de le faire. Comme je le disais plus haut, l'éditing est un métier.

Bon, on dira qu'il s'agit l d'une encyclopédie en train de se faire, que ce travail s'améliore au fil du temps. Mais, au bout de 4 ans d'existence de la version francophone, qu'un article (ou groupe d'articles) sur la théorie de l'évolution - sujet loin d'être anecdotique puisqu'il sous-tend l'ensemble des sciences du vivant - n'en soit que là, cela met très clairement à mal (1) le principe de la présupposée puissance d'édition de la « communauté » et (2) celui de la pertinence d'une ligne éditoriale laissée au jugement fluctuant des contributeurs.


Omissions, erreurs et lacunes
Pour ce qui est du contenu proprement dit, comment dire ?... Ce n'est ni fait ni à faire ! Cela a beau être une ébauche à compléter, le texte est très difficile à lire, par ses erreurs, ses omissions ou son manque de structure. C'est le genre de chose qui renforce les détracteurs de Wikipédia dans leur intime conviction. Quelques perles piochées au hasard :

Vous pourrez y chercher les noms de - en vrac - A.E. Wallace, Charles Lyell, Haldane, Wright ou bien des références au principe de Hardy-Weinberg, vous ne trouverez rien. Et il ne s'agit pas ici de chercher la petite bête : construire un (plusieurs) article(s) dans une encyclopédie, même pour le grand public, sans y insérer/expliquer/lier ne serait-ce qu'une fois les termes listés ci-dessus, ce n'est plus du travail « en train de se faire », c'est du manque de rigueur.

- (...) d'une sélection sexuelle (obtenir une descendance : séduire ou forcer un partenaire) sur laquelle Darwin insiste suite à ses observations dans les Galapagos, mais qui fut un peu négligée par ses continuateurs jusque vers la fin du XXème siècle où Stephen Jay Gould remit l'accent sur cette notion.
Collectif, « Sélection naturelle », Wikipédia, 12 octobre 2005.


C'est vrai qu'entre Darwin et Gould (où ? quand ? comment ?), rien n'a jamais été fait en matière de sélection sexuelle.

D'ailleurs, les récurrentes références à Stefen Jay Gould qui, s'il fût un grand vulgarisateur et penseur de l'évolutionnisme, n'est pas non plus l'unique figure marquante de la discipline - hors champ médiatique s'entend - sont plutôt agaçantes. Preuve une fois encore que les textes sont construits à partir de vulgarisation et non de sources primaires. Et la vulgarisation de la vulgarisation...

- Faits paléontologiques : les fossiles témoignent de la disparition de certaines espèces d'êtres vivants, et ainsi d'une certaine mouvance de la vie depuis son apparition (datée expérimentalement d'il y a 3,5 milliards d'années).
Collectif, « évolution », Wikipédia, 26 octobre 2005.

Bien sûr, l'apparition de la vie il y a « 3,5 milliards d'années » a été datée « expérimentalement » (où ? quand ? comment ? par qui ?). La « mouvance de la vie » est aussi une notion qu'il faudra qu'on m'explique.


Enfin, quand on regarde les Liens proposés relatifs aux théories de l'évolution, on peut se demander s'il s'agit des seules sources pertinentes auxquels on peut renvoyer les lecteurs. Cinq pauvres liens où, mise à part Talk.origin, rien de vraiment sérieux (Hominidés est un excellent site de vulgarisation, tout comme celui de Thierry Lombry, mais ce n'est pas ce que j'appelle des références en matière de théorie de l'évolution. Quant au reste...)

Le spectre de la manipulation
Passons maintenant à l'analyse des pages de discussion, qui sont censées témoigner de l'oeuvre en train de se faire. Je n'entrerai pas dans le détail de ces échanges qui me laisse parfois un peu perplexe quant aux compétences de certains contributeurs à écrire sur les sciences du vivant. Mais la page de discussion est intéressante parce qu'on y voit émerger une illustration de ce que pourrait être, à terme, le type de manipulation dont souffrirait Wikipédia.


Il s'agit d'une rhétorique archi-connue de ceux et celles qui « pratiquent » au quotidien les sciences en général, les sciences du vivant en particulier, et que l'on désigne sous le terme parfois impropre de « pseudosciences ». Pour faire court, un intervenant y tente d'expliquer en quoi la théorie de l'évolution est une absurdité, et un valeureux contributeur tombe dans le panneau en s'engageant dans un débat perdu d'avance, non pas par la faiblesse de ses arguments, qui sont souvent pertinents, mais par la mécanique même du dialogue qui s'est engagé. Il est toujours délicat de discuter avec ceux passés maître dans « l'art de ne jamais avoir tort ».


Alors, cette menace de manipulation se retrouve pour le moment sur la page de discussion, mais les rédacteurs de Wikipédia ont ici plutôt de la chance : on entend arrivé cette réécriture de la science à des kilomètres. Qu'en sera-t-il avec des individus qui savent mieux manier l'expression écrite, qui feront références à d'obscurs ouvrages ou à des notions qui nécessitent une expertise approfondie ?! Si des organes de diffusion spécialisés se sont laissés prendre par de telles manipulations, pourquoi Wikipédia ne le serait-elle pas ?!


Tests d'insertion de fausses informations
Imaginons pour terminer à quoi pourrait ressembler l'ultime étape de cette analyse. Elle pourrait prendre plusieurs formes :

- Modifier la date de publication de certaines oeuvres ou l'orthographe d'un nom.
- Ajouter de fausses données comme la théorie d'un chercheur fictif.
- Pointer des incohérences (apparentes) de raisonnement ou ajouter des résultats de recherche polémiques.

En faisant varier la subtilité de ses fausses assertions et en observant la réaction des rédacteurs, nous pourrions analyser l'évolution du contenu dans le temps et construire ainsi un outil statistique mesurant pour partie la fiabilité des articles publiés sur Wikipédia.


Conclusion provisoire
Wikipédia est une formidable réussite de travail collaboratif. Partie de rien, ou de pas grand chose, l'encyclopédie est devenue l'une des principales destinations des internautes à travers le monde. Elle n'existe, ne peut exister que par la multitude de ses contributeurs. Vouloir brider ou encadrer son processus d'édition reviendrait à dénaturer son principe de base. Malheureusement, c'est par ce principe que les plus évidentes failles voient le jour. Doit-on donc se résoudre à accepter non seulement l'imperfection de l'information véhiculée, mais sa potentielle fausseté, même temporaire ?!

Quand je vois les lacunes des articles consacrés à un domaine que je connais bien, comment pourrais-je faire confiance à ce qui serait écrit dans des disciplines que je maîtrise mal ou pas du tout ? Ce ne seront sans doute pas les mêmes contributeurs qui auront rédigé les textes (quoique la pluralité de certains laisse rêveur), et cette méfiance peut même s'avérer infondée, mais comment en être certain ? Une profession de foi n'est pas suffisante.

En matière de communication il y a l'émetteur, le canal d'émission, le message et le récepteur. On peut considérer que seul le message (le savoir) compte, et que le canal (le wiki) permet une multiplicité des émetteurs (la communauté wikipedia) et, par là même, une plus grande pertinence du message véhiculé (qualitativement - plusieurs paires d'yeux valent mieux qu'une - et quantitativement - un plus grand nombres de récepteurs touchés). Mais c'est nier deux choses :
- La spécificité de la construction de chaque savoir. Un savoir scientifique ne se construit pas comme un savoir artisanal par exemple. Appliquer le même modèle de développement est une erreur qui tient à la méconnaissance de ces spécificités (on apprend que la Terre tourne autour du Soleil, mais on n'explique pas comment on le sait. On ne le sait qu'à partir du moment où l'on devient soi-même un producteur de ce savoir).
- Les liens qui lient chacun des organes du processus de communication. La forme du message est - et sera toujours - intimement liée à ce qui l'émet, à ce qui le véhicule et à qui il est destiné. Croire que cette intime relation sera gommée parce qu'on multiplie les émetteurs par le truchement du canal est encore un peu facile. La source d'une information est tout aussi importante que l'information elle-même, et la « neutralité du point vue » semble illusoire à partir du moment où un article sera le sujet de conflits entre une multitude d'émetteurs qui n'auront pas les mêmes buts.

Finalement, on en arrive à revoir nos ambitions à la baisse :

Peut-être le terme « encyclopédie » est-il mal choisi, car on en vient à en exiger beaucoup trop. Sous le couvert d'une louable intention humaniste, on accepte ce qui paraîtrait inacceptable dans d'autres champs de diffusion du savoir, dans l'Education Nationale par exemple.

Mais le plus important sans doute, c'est que ces difficultés ne sont pas niées par une grande partie de la communauté wikipédienne, même si elle ne sont pas toujours envisagées à leur juste valeur. Une solution serait de construire un système d'édition justement comparable au développement d'un logiciel libre :
- une équipe réduite est en charge de l'édition de l'article, et seuls ses membres sont habilités à le modifier.
- une zone de dialogue avec l'ensemble des membres de la communauté où chacun peut proposer corrections, améliorations du texte.
- mise à jour régulière du dit article en fonction des discussions.
Pour synthétiser, un groupe restreint (qui peut se compter en dizaines de personnes) en charge d'un article, d'une thématique, et l'ensemble de la communauté qui développe « à la marge ». Progressivement, et à l'instar des logiciels libres, les textes ne pourraient que s'améliorer tout en évitant les éventuelles ou hypothétiques dérives.



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